dimanche 8 avril 2007

Premières clartés du matin :Réflexions sur les sciences sociales et les sciences exactes !

"...Comme, par ailleurs, le problème clé qui se pose aux sciences de la nature est celui de leur inscription dans la complexité socio-culturelle, les scientifiques de ces sciences, de par leur formation/déformation dont j'ai parlé, ne sont pas , loin de là, préparés à comprendre cette inscription, c'est-à-dire à comprendre leur science même. (1)
Par contre, le sociologue, s'il dispose d'une culture qui lui a fait engranger les apports théoriques de ... (ici liste de nombreux penseurs ) et autres, s'il s'intéresse aux problèmes et travaux de sociologie de la science, dispose d'un site plus favorable pour envisager les vastes et profonds problèmes sociaux que pose aujourd'hui la connaissance scientifique.
Mais, pas plus, pas moins qu'un autre, il (le sociologue ) n'est qualifié pour affronter les problèmes de fond aveuglés à l'intérieur de chaque discipline, notamment le problème de la connaissance de la connaissance
.

Il n'y a aucun site favorable d'où l'on puisse préjuger a priori de la justesse d'une pensée. Il n'y a aucun tribunal suprême pour juger de la clairvoyance ou de l'intelligence. Si un esprit se montre rationnel et rigoureux dans le champ clos de sa discipline, il ne peut être crédité de cette qualité ni sur le plan des idées générales, ni sur les terrains de la vie intellectuelle, sociale et politique. C'est à lui de manifester dans ces domaines l'attention aux données, la critique des sources, la pertinence du diagnostic, l'adéquation de la théorisation, la prudence là où l'information fait défaut, la hardiesse là où il faut se dresser contre le courant. C'est à chacun de tenter d'éviter l'illusion et l'arrogance, de discerner ceux qui le trompent, de vivre pleinement ce que signifie le mot recherche dans le jeu incertain de la vérité et de l'erreur.

Le comprend-on ? Il ne s'agit pas ici d'opposer l'expérience vécue à l'abstraction théorique, les sciences sociales aux sciences exactes, la réflexion philosophique à la théorie scientifique. Il s'agit de les enrichir les unes les autres en les faisant communiquer... "

Edgar Morin, Science avec Conscience, Librairie Arthème Fayard, 1982 .

Les "états d'âme" de ce penseur profond, souvent abstrait, pénétrant, pugnace, (qui présente en toutes circonstances de l'ardeur dans une sorte de lutte qu'il a engagée pour justifier les prérogatives des sciences sociales )mais toujours très critique envers les savants des sciences dites exactes, doivent être pris en considération et analysés avec toute l'attention qu'ils méritent. La connaissance de ses oeuvres provoque toujours une réflexion intense très bénéfique à tout individu qui apprécie les provocations intellectuelles.

(1)Edgar Morin, présente et affirme ici que "les scientifiques de ces sciences ne sont pas préparés à comprendre " l'ensemble des connaissances, même celles de leur propres disciplines.
Cette affirmation est difficilement acceptable car elle laisse penser que cette situation est générale, ce qui n'est absolument pas le cas.


Des Pasteur, des Claude Bernard, des Sigmund Freud, des Flammarion, des Schrodinger, des Louis de Broglie, des Einstein ..., avaient une vie sociale très active et avaient su se construire des relations en dehors de leurs préoccupations scientifiques dans le monde extérieur, en particulier celui des Sciences Sociales.

A seize ans, Pasteur était passionné par la peinture, faisait des tableaux et étudiait l'histoire de la vie des grands peintres.
A dix-huit ans, Claude Bernard écrivait une tragédie.
A vingt ans Freud se passionnait pour la physiologie animale et le problème des niches écologiques.
Flammarion, se passionnait pour la vulgarisation des sciences et publiait son Astronomie Populaire.
Schrodinger, étudiait l'histoire des civilisations et des religions de l'Extrême- Orient ; en 1941, à Dublin en Irlande, il écrivit :" Qu'est-ce que la vie ?, un chef-d'oeuvre touchant tous les aspects de l'écologie du monde vivant et de l'humanité.
Louis de Broglie, préparait une licence d'histoire ; plus tard après ses travaux sur la mécanique ondulatoire, il discuta des problèmes de la vulgarisation scientifique, présenta ce s thèmes : La culture scientifique suffit-elle à faire un homme?; La science contemporaine et les valeurs humaines traditionnelles.
Einstein, jeune ingénieur au bureau des inventions de Berne, en Suisse, consacra ses loisirs à l'étude des problèmes fondamentaux et humains de la physique et publia son livre : Comment je vois le monde.

Malgré ce constat de désacccord avec cette affirmation de Edgar Morin qu'il était nécessaire de préciser, nous reprendrons plus tard l'analyse de ses ouvrages provocateurs, mais qui sont d'un très grand intérêt car ils incitent à une réflexion constructive sur les problèmes essentiels de la "connaissance de la connaissance " thème favori de cet auteur !

A bientôt, GERBOISE.

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