jeudi 15 mai 2008

Premières clartés du matin :L' "Ecrivain public"qui assistait* et écrivait pour autrui,accessible à tous,il s'acquitait d'un rôle social décisif .**

* assistait : était à leur côté , avec eux , se tenait auprès de chaque requérant en vue de l' aider dans la construction de son message , en le conseillant intimement, en vue de le seconder .
** décisif : déterminant, qui résout une difficulté, tranche un débat, d'une manière incontestable et définitive .
° s'acquittait de : menait à bien, accomplissait ...

" Celui qui écrit pour d"autres "

" Prenez vos plumes sacrées, vous qui composez les missives de toutes natures, agiles instruments d'un prompt écrivain et d'une main diligente, hâtez-vous de transcrire ces messages pour l'ensemble de ces bonnes gens " (origine inconnue) .

Celui qui, par profession, " jette par écrit " les pensées des autres dans des lettres, des billets, des pétitions , pour les assister en se substituant à eux, en leur " prêtant sa main et son esprit !

Cet écrivain public par son assistance à autrui , à la vue de tous, faisait preuve d'une activité communautaire nécessaire à la bonne marche de la société . Ce calligraphe éminent (qui est au-dessus du niveau commun) ,émérite ( qui par une longue pratique, a acquis une compétence, une habileté remarquable) , cet expert dans l'art de bien écrire lisiblement , de bien former les caractères, " savant " aux yeux des illettrés, des ignorants du langage, des analphabètes ne chômait pas dans son échoppe (boutique) exiguë . Pour une somme modique (à la portée de toutes les bourses) , il donnait son encre, son parchemin, sa cire à cacheter ainsi que sa maîtrise de la façon de rédiger, d'interpréter les dires de son interlocuteur en fonction du destinataire, de présenter l'ensemble d'une façon cohérente et judicieuse . Dans son confessionnal (réduit où l'on entendait toutes sortes de déclarations singulières [ ? ] et secrets qui devaient être confiés uniquement au message rédigé, et ne pouvait être divulgué : d'où l'usage de la cire à cacheter) ouvert aux courants d'air (sur la place publique, à tous les vents) , ce spécialiste de la plume, doublé d'un psychologue recevait bien des confidences . L'air gêné, embarrassé, ils venaient tous lui raconter leur petite histoire : l'amoureux éconduit (repoussé) qui voulait relancer (obtenir d'elle une réponse favorable) sa belle ; la jeune campagnarde qui nourrissait (entretenait en elle) mille tendres pensées pour son promis (fiancé) ; le jeune enrôlé dans l'armée ou la gendarmerie, qui avait la nostalgie du pays (de son village) ; l'ouvrier aux abois (dans une situation désespérée) qui voulait demander un délai à l'usurier ; le bourgeois qui ne savait trop comment tourner son texte adressé à un haut personnage influent , en vue de se faire accorder une grâce, une faveur . Le scribe omniscient ( universel, encyclopédique, celui qui écrivait et qui connaissait une multitude de choses de la vie , était au courant de tout) savait toujours ce qu'il fallait dire et sa plume bien taillée courrait , infatigable, sur le parchemin .
Belles et nobles occupations, importante fonction publique, étaient les siennes !
Dans d'autres circonstances, cependant, il assumait un rôle plus ingrat en truquant (en donnant une fausse apparence, réalité) les comptes de la cuisinière qui faisait " danser l'anse du panier " (faire des profits illicites sur les denrées qu'on achète ; profiter des emplettes, des commissions, pour falsifier, fausser, les prix des acquisitions sur le marché et/ou dans les boutiques ; cette expression est apparue vers 1622) . Oui, les temps étaient durs à ces époques-là ! et il fallait bien survivre,résister à l'épreuve du temps, n'est-ce pas ?

Nous avons, il y a quelque (à peu près) temps, retrouvé sur un marché dans une très ancienne rue de Paris, un vieil homme tout barbu , certainement très érudit, qui malgré les effets de son âge, tenait encore commerce d'écrivain public . Un petit groupe d'humbles gens attendait leur tour, des papiers à la main . Je me souviens encore de son coup d'œil furtif vers moi, interrogateur , puis ironique , avant de reprendre son occupation d'écriture .
A bientôt,bien à vous, Gerboise .

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