lundi 22 août 2011

C'est peu de chose*,à première vue,qui fera l' objet** de ce billet, mais cependant,ce genre de chose est un objet important de notre langue française


Ces cinq illustrations qui précèdent les définitions différentielles des choses et des objets proviennent du Tome III de l'ouvrage : Histoire Générale du travail publié à la Nouvelle librairie de France , G.-V. Labat Éditeur, 1996 . Les 4 Tomes qui parcourent les grands événements de l'histoire de l'activité humaine dans le monde apporteront à l'ensemble de ses lecteurs une richesse culturelle appréciable . Gerboise vous conseille vivement de prendre connaissance de cette publication .

Elles vont nous faire entrevoir , discerner, prendre conscience des subtilités des diverses significations des mots de notre langue .

Traverses humaines .

Image ci-dessus , illustrant une certaine idée horrible des " CHOSES " de la Société . Ces " traverses " ici , ne sont pas des " OBJETS " matériels, mais des " OBJETS " virtuels représentés par des êtres humains .

" Une véritable rage de créer, de produire, de construire et d'organiser s'empare des hommes de l'Occident. Ainsi aux USA, le système Vanderbilt provoque la révolte des fermiers écrasés par le monopole des compagnies de chemin de fer comme l'atteste cette caricature".





Ce drame, cette tragédie, insoutenable, poignante fut une " CHOSE " atroce, cruelle !

" Exploitation du sous-sol présente de nombreux dangers : incendie, coup de grisou, gaz toxiques, éboulements, maladresse ou imprudence du mineur . Ci-dessus, en mars 1906, les corps des victimes sont ramenés au jour après la catastrophe des mines de Courrières dans le Pas-de-Calais en France " .





Cette ouverture de bibliothèque fut une " CHOSE " fabuleuse, exceptionnelle . La mise à disposition des livres au grand public , ces " OBJETS " de culture, sera un événement aux conséquences inimaginables .



" L'association polytechnique pour le développement de l'instruction publique ou Auguste Comte enseigna, ouvrit la première bibliothèque populaire en 1835 . Cette initiative sera suivie par l'ouverture au public de la bibliothèque Sainte-Geneviève, ( illustration ci-dessus) " .






Lieu, où des " OBJETS " matériels à acquérir, sont à la disposition du public en vue de leur vente et font l'objet de désirs parfois addictifs, c'est-à-dire qui créent une conduite menant à une certaine dépendance, un besoin impératif d'acheter et donc de posséder .



" C'est dans les domaines de l'habillement et du textile que les grands magasins s'imposent . Les élégantes savent qu'elles y trouveront les " nouveautés . Le bon marché (vue ci-dessus) , fondé en 1852 par Aristide Boucicaut , servira de modèle à Émile Zola pour Au bonheur des dames " .





Ce fut une belle " CHOSE " que l'invention du métier à tisser . La vue de cet atelier ci-dessus montre de très nombreux " OBJETS " très divers , de toute sorte, ainsi que des personnages et un mode de vie particulier à cette époque . Ce sont les " CHOSES " de la vraie Vie au début du XIXe siècle, dans ce monde industriel.



" De dimensions impressionnantes, le métier à tisser de type Jacquard occupe tout l'espace utile de ce logis de canut lyonnais . Le système de la " fabrique " est en effet basé sur le travail à domicile, dont les impératifs ont priorité sur la vie privée de l'ouvrier " .



* chose : par opposition à phénomène ou à fait, implique une réalité envisagée à l'état statique comme constitué par un système supposé fixe de qualité et de propriétés . Leçon de choses : sciences naturelles, en biologie, en sciences de la terre ; regarder les choses en face: réalité . Il se sent tout chose : décontenancé, penaud, mal à l'aise . Se tenir informé des choses : actualité . Chose sans gravité : incident .



** objet : ce qui nous est présenté par la perception, comme indépendant du sujet qui connaît ; tout ce qui est susceptible d'être perçu . Objet d'une conférence : matière, question, sujet . Objets matériels de toute nature .


Le dictionnaire Littré nous permet d'être plus exhaustif en envisageant une plus grande variété de contextes .




Chose :





1 - désignation indéterminée de tout ce qui est inanimé . Les belles choses de la terre ; chose étrange, inouïe, incroyable.

2 - chose se dit quelquefois des personnes . Je suis chose légère, et vole à tout sujet, Je vais de fleurs en fleurs et d'objet en objet . La Fontaine .




3 - la chose publique, l'État , l'Administration.

4 - ce dont il s'agit . Je vais vous expliquer la chose . Voilà quel est l'état des choses .

5 - terme de droit . Chose jugée, ce qui a été résolu par une décision judiciaire en dernier ressort, ou ce qui n'est plus susceptible d'appel ou d'opposition .




6 - terme de droit . Bien, propriété, possession . Choses hors du commun .



7 - en termes de grammaire . Chose se dit par opposition à personne . Le pronom quoi se rapportent toujours à des choses, il ne se rapporte jamais à des personnes.

8 - ce qui est en fait, en réalité, par opposition à ce qui est un mot, un nom . Vous ne nous donnez que des mots, et nous voulons des choses .

9 - quelque chose, une chose de quelque valeur; une chose indéterminée . Il y a en vous quelque chose de surnaturel . Montrez-nous autre chose de beau . Dites-nous autre chose de gai .



10 - peu de chose: chose inutile, sans valeur . Cette découverte est peu de chose et je vous l'abandonne .

11 - grand-chose : quelque chose qui a de l'importance ." À quoi vous servait d'irriter des gens qui, sans être grand-chose, tiennent à quelque chose ? " Courteline .

12 - familièrement, chose se dit en place d'un terme, d'un nom qui ne revient pas à l'esprit . Monsieur chose . C'est agaçant, enfin une chose, quoi, vous comprenez !

13 - populairement, être tout chose, être mal disposé soit pour la santé soit pour l'humeur . Je suis tout chose ce matin .




Objet :


1 - tout ce qui se présente à la vue. Quel objet se présente à mes yeux ? Ce n'est pas seulement des hommes à combattre ; c'est des montagnes inaccessibles . Tous les objets paraissent sombres et en confusion le matin aux premières lueurs de l'aurore . Bossuet .

2- tout ce qui affecte les sens . Les couleurs sont les objets de la vue, les odeurs de l'odorat, les saveurs du goût, les sons de l'ouïe, la nature des états de surfaces , du tact .

3 - terme de philosophie . Objet matériel, la chose même qu'une science considère .

4 - chose, dans un sens indéterminé . C'est un objet de peu de valeur . Objets de première nécessité . Un objet de dépense .

5 - tout ce qui se présente à l'esprit, tout ce qui l'occupe . Le plus charmant objet de la nature,le plus capable d'émouvoir un coeur sensible et de le porter au bien, est, je l'avoue, une femme aimable et vertueuse ; mais cet objet céleste où se cache-t-il ? J.J. Rousseau . L'objet de mes recherches est toujours présent à mon esprit, est fréquemment l'objet de mes pensées, de mes préoccupations .

6 - tout ce qui sert de matière à une science, un art, à une oeuvre littéraire. Les corps naturels sont l'objet de la physique . Le sublime ne peut se trouver que dans les grands sujets; la poésie, l'histoire et la philosophie ont toutes même objet, l'homme et la nature .

7 - tout ce qui est la cause, le sujet, le motif d'un sentiment, d'une passion . Puis- je d'un tel chagrin savoir quel est l'objet . Corneille .

8 - but, fin qu'on se propose. Jusqu'ici les traités de paix avaient la guerre pour véritable objet .

9 - et par excellence, l' être aimé . Non, non, ce cher objet à qui j'ai pu déplaire [ma mie,la chose la plus précieuse de ma vie] .



10 - Il s'est dit pour la personne d'un homme ou d'une femme, pour l'image d'un objet .[ Le cerf se mirant dans une fontaine] ... ne pouvait qu'avoir que peine . Souffrir ses jambes de fuseaux. Dont il voyait l'objet se perdre dans les eaux, La Fontaine, fable .



11 - Terme de grammaire générale . Se dit quelquefois du complément ou régime direct, par opposition à sujet . L'objet est un accessoire du verbe ; il doit le suivre immédiatement, ou du moins il n'en peut être séparé que par des modifications mêmes du verbe . Les corps naturels sont le sujet de la physique .






Chose :





1-Dans l'usage ordinaire : terme indéterminé servant à désigner n'importe objet de pensée . Le créateur de toute chose . Parler de choses et autres . " La conscience est toujours conscience de quelque chose " Husserl .



" Dans les grandes choses, les hommes se montrent comme il convient de se montrer ; dans les petites, ils se montrent comme ils sont ." Chamfort, Maximes et Pensées, 1812 .


2 -Par opposition à personne : l'être dénué dde conscience réfléchie .


" O soleil ! sans quoi les choses

Ne seraient que ce qu'elles sont ." E. Rostand, Chanteclerc .



" Le seul moyen qu'ait le petit enfant d'étendre son empire sur les choses, qu'il ne sait pas manier, est de savoir manier les personnes " . P. Guillaume, Introduction à la psychologie .



3 - Choses en soi : ce qui a une existence indépendante .


" Chose pensée, [utilisé par Platon dans le Timée pour désigner les Idées] opposée aux phénomènes : au sens de réalité intelligible inconnaissable mais pensable " .




Objet :



1 - Désigne ce qui se présente à quelque fonction de connaissance, intellectuelle aussi bien que sensible .


"Tout ce qui se présente aux sens et à l'esprit .


Chaque corps qu'on voit est un objet qui tombe sous les sens, chaque idée qu'on a est un objet qui s'offre à l'esprit " Condillac .


2 - Objet-chose : Toute réalité matérielle qui peut être maniée . Un livre, un crayon, un échantillon de roche sont des objets ; Un nuage, l'eau, un affleurement de roche ne sont pas appelés de ce nom .


3 - Au figuré : ce dont il s'agit, ce dont s'occupe l'esprit, ce sur quoi porte une action ... Objet d'une réunion, ou d'un livre, de vives critiques .


4 - Plus précisément : ce qui est visé, le résultat vers lequel on tend . L'objet d'un désir, d'une démarche .




CHOSE



Pris dans le sens général d'objet quelconque, désigne toute réalité concrète ou abstraite .


Il faut lutter contre la paresse d'esprit qui tend à remplacer par le mot chose, le terme précis qui exprimerait exactement ce qu'on veut dire .


Chose ne peut guère avoir de synonymes, puisqu'il finit par remplacer tous les mots . Des termes de sens très général, mais moins vagues, tels que objets, idées, sentiments, détails, doivent souvent lui être préférés .


Dans un sens très général, tout ce qui est, tout ce qui existe .


C'est la plus belle chose du monde .


Leçon de choses, notions scientifiques élémentaires données aux enfants à propos des objets ou des matières usuelles .


Tout être inanimé, soit concret, soit abstrait, tout ce qu'on dit ou que l'on peut dire, tout ce que l'on fait ou que l'on peut faire, tout ce qui n'a pas de nom particulier .


Faire de belles, de grandes choses . Faites cela avant toute chose . Il a très bien pris la chose .


Tout objet qui intéresse l'homme, qui a quelque rapport avec lui .


Les choses humaines . Les choses de ce monde . Bien, tout objet qu'on possède en propre . C'est mon bien, ma chose . Aller au fond des choses, ne pas s'arrêter à un examen superficiel .


Nous sommes peu de chose !



Les choses et les objets peuplent le monde où ils s'offrent à notre perception sensible . Nous n'usons pas ordinairement de ces mots pour nommer les réalités qui échappent à nos sens Et pourtant n'en existe pas moins Les atomes,les ondes, mais encore les sentiments ou les idées ainsi que les souvenirs .


Les choses et les objets sont d'abord des éléments du monde des corps .


La chose est d'abord un corps qui possède son identité, mais un corps inerte .Dès qu'il y a de la vie,on parle d'êtres, et non plus de choses. Il s'ensuit que dans l'univers des existants ,La chose ne jouit que d'un degré inférieur de dignité . Désigner " quelque chose " comme une chose, " "cette chose là ", c'est manifester le peu d'intérêt qu'on lui porte, La maigre estime où on la tient. Ce qui nous renvoie au sens moral et juridique du mot: est chose ce qui est disponible pour la jouissance et l'appropriation par les sujets de droit que sont les personnes.


Une chose peut être traitée comme un simple moyen, Une personne doit toujours être considérée en même temps comme une fin .


La notion d'objet ne prend son sens que dans la relation avec un sujet . L'objetum , c'est ce qui est jeté, placé devant, en face du sujet . On parle par exemple d'objet de connaissance : Ce que l'esprit [le sujet] cherche à connaître . Dans la mesure où cette connaissance est conforme à la réalité de l'objet, c'est-à-dire dans la mesure où c'est réellement une connaissance, elle sera dite objective . On parle aussi d'objet d'une passion,d'un sentiment : L'objet amoureux [ rien à voir avec la " femme objet ", expression dans laquelle " objet " est plutôt entendre au sens de " chose " ] .


Contrairement à la chose,qui se contente d'être là ,donnée factuelle livrée à la perception et à la manipulation, isolée, passive et a priori indifférente à la manière dont nous l'appréhendons et la traitons , l'objet est constitué par le regard que nous portons sur lui , l'intérêt que nous lui accordons,le projet à travers lequel nous le visons. Ce que montre bien le statut de l'objet scientifique.


Une science se définit d'abord par son domaine d'objet. Mais l' objet scientifique n'est jamais un simple donné,il se contenterait [comment la chose ] d'être là,attendant qu'on s'intéresse à lui.


Bachelard a bien montré qu'il n'existe d'objet pour la science que constitué par la science.


Cette constitution de l'objet passe par tout un travail de déconstruction de la chose telle qu'elle se présente à la perception commune et à l'expérience première. Son livre :La formation de l'esprit scientifique a décrit avec un luxe de détails la façon dont le premier contact avec le monde des choses,loin d'ouvrir un boulevard à la connaissance scientifique, entasse sur son chemin de redoutables "obstacles épistémologiques".


Dans le monde des choses,il n'y a ni gravité,ni inertie,ni champ,ni sélection naturelle . En sciences, dit Bachelard, " les données sont des résultats " , produits par un labeur de conceptualisation, ainsi que par les techniques d'observation et d'expérimentation. Le microscope, le spectroscope, l'accélérateur de particules font naître de nouveaux objets. Et encore,à condition d'être utilisé par des esprits avertis.



" Le microscope,dit Alain ,n'instruit pas l' ignorant,il l' étourdit " .



Ce qui est vrai des choses il est aussi bien des faits, que le scientifique ne peut pas davantage se dispenser de construire. La chose , c'est ce qui va de soi.


En sciences, dit Bachelard, " Rien ne va de soi . Rien n'est donné. Tout est construit " [ La formation de l'esprit scientifique] . Il y a un " chosisme " [ le mot est de Bachelard ] spontané de la pensée commune,en vertu duquel l'esprit tend à se représenter toute réalité sur le modèle des choses sensibles. Il appartient à l'esprit scientifique de se défaire de ce " réalisme naïf " pour lui substituer une organisation d'objets de pensée, qui sont eux-mêmes des " objets d'expériences techniques " [ L'activité rationaliste de la physique contemporaine] .




Oui , en metant les choses au mieux, au pire, je vais vous dire une bonne chose : on est bien peu de chose ! Par la force des choses , ainsi vont les choses qui font l'objet de nos préoccupations ; il est parfois nécessaire de prendre les choses comme elles viennent avant de prendre les choses en main !




Aux lecteurs de ce texte :




Vous trouverez dans le billet du 13 Juillet 2011 l'explication de la cause de mes silences . Par la force des choses , je dois m'occuper en priorité de l'objet de ma vie : ma douce compagne plongée dans son nouveau monde sans mémoire ...




Fidèlement vôtre, Gerboise




mercredi 27 juillet 2011

Condorcet : Esquisse d'un tableau historique des progrès de l'esprit humain .[où est retracé avec un réalisme impitoyable et l'esprit critique *





. * du grand mathématicien, tous les aléas, les vicissitudes , les successions des situations les plus contradictoires , l'instabilité, la précarité , mais également les avancées , " l'ascension " de l'ensemble de l'humanité, qui l'ont conduite où nous en sommes à l'heure actuelle] .

L'esquisse d'un tableau historique des progrès de l'esprit humain , de Condorcet [ 1743- 1795 , Jean- Antoine- Nicolas Caritat , marquis de Condorcet], fut écrite, dit-on, sous le coup de la cruelle proscription qui aboutit à sa mort . S'il n'avait aucun espoir qu'elle fût connue de son vivant et éveillât l'intérêt de la France en sa faveur , c'est un exemple singulier d'attachement d'un homme à des principes que l'expérience quotidienne démentait d'une manière si funeste pour lui-même . Voir l'esprit humain, dans l'une des nations les plus éclairées du monde et au terme de plusieurs milliers d'années, dégradé par une fermentation de passions répugnantes - peur, cruauté, rancune, vengeance, ambition, fureur, folie - telle qu'elle aurait fait la honte de la nation la plus sauvage à l'époque la plus barbare, cela a dû être un choc si terrible pour ses idées sur le progrès nécessaire et inévitable de l'esprit humain, que rien n'aurait pu y résister, sinon la foi la plus inébranlable en la justesse de ses thèses, en dépit de toutes les apparences .

... " L'homme naît avec la faculté de recevoir des sensations, d'apercevoir de distinguer, dans celles qu'il reçoit, les sensations simples dont elles sont composées, de les retenir, de les reconnaître, de combiner, de conserver ou de rappeler dans sa mémoire, de comparer entre elles ces combinaisons, de saisir ce qu'elles ont de commun et ce qui les distingue, d'attacher des signes à tous ces objets, pour les reconnaître mieux, et s'en faciliter de nouvelles combinaisons ."...

...Y a-t-il, sur le globe, des contrées dont la nature ait condamné les habitants à ne jamais jouir de la liberté, à ne jamais exercer leur raison ?
Cette différence de lumières, de moyens ou de richesses, observée jusqu'à présent chez tous les peuples civilisés, entre les différentes classes qui composent chacun d'eux ; cette inégalité, que les premiers progrès de la société ont augmentée, et pour ainsi dire produite, tient-elle à la civilisation même, ou aux imperfections actuelles de l'art social ? Doit-elle continuellement s'affaiblir pour faire place à cette égalité de fait, dernier but de l'art social, qui, diminuant même les effets de la différence naturelle des facultés, ne laisse plus subsister qu'une inégalité utile à l' intérêt de tous, parce qu'elle favorisera les progrès de la civilisation, de l'instruction et de l'industrie, sans entraîner, ni dépendance, ni humiliation, ni appauvrissement ?




En un mot, les hommes approcheront- ils de cet état où tous auront les lumières nécessaires pour se conduire d'après leur propre raison dans les affaires communes de la vie, et la maintenir exempte de préjugés, pour bien connaître leurs droits et les exercer d'après leur opinion et leur conscience ; où tous pourront, par le développement de leurs facultés, obtenir des moyens sûrs de pourvoir à leurs besoins, où, enfin, la stupidité et la misère ne seront plus que des accidents, et non l'état habituel d'une portion de la société ?




Enfin, l'espèce humaine doit-elle s'améliorer, soit par de nouvelles découvertes dans les sciences et dans les arts, et par une conséquence nécessaire, dans les moyens de bien-être particulier de prospérité commune ; soit par des progrès dans les principes de conduite et dans la morale pratique ; soit enfin par le perfectionnement réel des facultés intellectuelles, morales et physiques, qui peut-être également la suite, ou de celui des instruments qui augmentent l'intensité ou dirigent l'emploi de ces facultés, ou même de celui de l'organisation naturelle ?


En répondant à ces trois questions, nous trouverons, dans l'expérience du passé, dans l'observation des progrès que les sciences, que la civilisation ont faits jusqu'ici, dans l'analyse de la marche de l'esprit humain et du développement de ses facultés, les motifs les plus forts de croire que la nature n'a mis aucun terme à nos espérances ...


Une lecture enrichissante et une belle leçon de réalisme à méditer .


Bien à vous toutes, à vous tous , Gerboise .

mercredi 20 juillet 2011

Une Philosophie présentée oralement. La philosophie, science qui étudie et spécule* sur les problèmes fondamentaux de l'homme, de la vie .

* Spéculer : méditer attentivement, se livrer à la recherche abstraite ; spéculer sur quelque chose : compter dessus pour réussir .

La Philosophie, c'est un travail critique [ l'esprit critique préconisé, recommandé par Gerboise pour son excellence et comme élément important, fondamental, de notre rapport au monde] de la pensée sur elle-même, en même temps qu'un effort pour rendre notre existence intelligible ; elle est l'acte d'une pensée s'exerçant à sa propre liberté et s'affrontant à la question du sens, sans autre secours que ceux qu'offrent la raison et l'expérience .

" Entrer en philo , vos premiers pas " , présentation orale en CD par Jean-Paul Jouary, est un document de grande qualité qui vous aidera à pénétrer dans les premiers territoires de ce champs de connaissances, si formateur de l'esprit : voir les caractéristiques sur les deux images de la pochette du CD , ci-dessus et ci-dessous .

Pour aborder sereinement ce thème, il existe un ouvrage en livre de poche : chez Idées/Gallimard, de Alain, Éléments de philosophie, publié en 1941, que Gerboise vous recommande également de lire en vue de vous imprégner de sa bénéfique substance .

Je pense qu'il est important de vous faire connaître " l'introduction " présentée par l'auteur, Alain, le 10 Mars 1940 . La voici :

" Le mot philosophie, pris dans son sens le plus vulgaire, enferme l'essentiel de la notion. C'est, aux yeux de chacun, une évaluation exacte des biens et des mots ayant pour effet de régler les désirs, les ambitions, les craintes et les regrets. Cette évaluation enferme une connaissance des choses, par exemple s'il s'agit de vaincre une superstition ridicule ou un vain présage ; elle enferme aussi une connaissance des passions elles- mêmes et un art de les modérer. Il ne manque rien à cette esquisse de la connaissance philosophique. On voit qu'elle vise toujours à la doctrine éthique, ou morale, et aussi qu'elle se fonde sur le jugement de chacun, sans autre secours que des conseils des sages. Cela n'enferme pas que le philosophe sache beaucoup, car un juste sentiment des difficultés et le recensement exact de ce que nous ignorons peut-être un moyen de sagesse ; et cela enferme que le philosophe sache bien ce qu'il sait, et par son propre effort. Toute sa force est dans un ferme jugement, contre la mort, contre la maladie, contre un rêve, contre une déception. Cette notion de la philosophie est familière à tous et elle suffit.

Si on la développe, on aperçoit un champ immense et plein de broussailles, c'est la connaissance des passions et de leurs causes . Et ces causes sont de deux espèces ; il y a des causes mécaniques contre lesquelles nous ne pouvons pas beaucoup, quoi que leur connaissance exacte soit de nature à nous délivrer déjà, comme nous verrons ; il y a des causes d'ordre moral, qui sont des erreurs d'interprétation, comme si, par exemple, entendant un bruit réel, j'éprouve une peur sans mesure et je crois que les voleurs sont dans la maison. Et ces fausses idées ne peuvent être redressées que par une connaissance plus exacte des choses et du corps humain lui-même, qui réagit continuellement contre les choses, et presque toujours sans notre permission, par exemple quand mon coeur bat et quand mes mains tremblent.

On voit par là que, si la philosophie est strictement une éthique, elle est, par cela même, une sorte de connaissance universelle, qui toutefois se distingue par sa fin des connaissances qui ont pour objet de satisfaire nos passions ou seulement notre curiosité. Toute connaissance est bonne au philosophe, autant qu'elle conduit à la sagesse ; mais l'objet véritable est toujours une bonne police de l'esprit.
Par cette vue, on passe naturellement à l'idée d'une critique de la connaissance. Car la première attention à nos propres erreurs nous fait voir qu' il y a des connaissances obscurcies par les passions, et aussi une immense étendue de connaissances invérifiables et pour nous sans objet, et qui ont deux sources, le langage, qui se prête sans résistance à toutes les combinaisons de mots, et les passions encore, qui inventent un autre univers, plein de dieux et de forces fatales , et qui y cherchent des aides magiques et des présages . Et chacun comprend il y a ici à critiquer et à fonder, c'est-à-dire à tirer de la critique des religions une science de la nature humaine, mère de tous les dieux. On appelle réflexion ce mouvement critique qui, de toutes les connaissances, revient toujours à celui qui les forme, en vue de le rendre plus sage.

La vraie méthode pour former la notion de philosophie, c'est de penser qu'il y eut des philosophes. Le disciple devra se tracer à lui-même le portrait de ces hommes étranges qui jugeaient les rois, le bonheur, la vertu et le crime, les dieux et enfin tout. Ce qui est plus remarquable, c'est que ces hommes furent toujours admirés, et souvent honorés par les rois eux-mêmes. Joseph en Égypte expliquait les songes ; c'est ainsi qu'il devint premier ministre. Admirez ici l'art de débrouiller les passions, de deviner la peur, le soupçon, le remords, enfin tout ce qui est caché dans un roi.

D'après l'exemple de Joseph on comprendra qu'en tous les temps, et en toutes les civilisations, il y eut des philosophes, hommes modérateurs, hommes de bon conseil, médecins de l'âme en quelque sorte. Les astrologues, si puissants auprès des tyrans, furent sans doute des philosophes très rusés, qui feignaient (feindre, donner pour réel un sentiment, une qualité que l'on a pas ; cacher à autrui ce qu'on sent, ce qu'on pense, en déguisant ses sentiments) de voir l'avenir dans les conjonctions ( action de joindre) des astres, et qui en réalité devinaient l'avenir d'après les passions du tyran , d'après une vue supérieure de la politique. Ce fut toujours le sort des philosophes d'être crus d'après une vue plus perçante qu'on leur supposait, alors qu'ils jugeaient d'après le bon sens. Faites donc maintenant le portrait de l'astrologue de Tibère qui n'était pas moins fin .

Décrivez les passions de l'un et de l'autre dans ce jeu serré. Aidez-vous de la première scène du Wallenstein de Schiller ; et aussi de ce que Schiller et Goethe en disent dans leurs lettres. Vous êtes ici en pleine réalité humaine, dans ce terrible camp, où la force, la colère et la cupidité font tout ; c'est une forme de civilisation . Si vous y reconnaissez l'homme qui est autour de vous, et vos propres sentiments, vous aurez fait déjà un grand progrès. Mais il ne s'agit point de rêver ; il faut écrire et que ce soit beau .

Ce sera beau si c'est humain.

Pousser hardiment dans cette direction, c'est celle du vrai philosophe. Si vous doutez là-dessus, ouvrez seulement Platon n'importe où, et écartez tout de suite l'idée que Platon est difficile . Ce que je propose ici de Platon n'est ni caché, ni difficile, ni discutable. Faites ce pas, qui est décisif pour la culture.

Le lecteur ne s'étonnera pas qu'un bref traité commence, en quelque façon, par la fin, et procède de la police des opinions à la police des moeurs, au lieu de remonter péniblement des passions et de leurs crises à l'examen plus froid qui les corrige un peu en même temps que l'âge les refroidit " .

Alain .

Nous terminerons ce billet [ Gerboise ] par une définition de la philosophie que nous considérons la plus noble : celle de l'humanisme

Qui est la doctrine qui pose la dignité inaliénable de toute personne et vise à procurer à chacun des conditions de son plein épanouissement intellectuel et physique ; celle d'un esprit philosophique, d'un esprit plein de clarté, de méthodes ; celle d'un esprit exempt de préjugés, de passions .

Pour mettre un point final à notre billet , disons que la philosophie est une spéculation sur les principes premiers du monde et de la vie, présentée sous la forme d'une théorie générale de la connaissance et de l'action .

C'est dans le billet du 13 Juillet 2011 que je précise les circonstances de l'absence de billets durant presque trois mois .



Fidèlement vôtre, Gerboise .

mercredi 13 juillet 2011

Alzheimer*, ou la déchéance** de la mémoire et de l'esprit ; leurs décadences*** ; leurs déclins**** ; leurs dégénérescences***** .

Voir la suite de cette liste des sujets traités, après les deux figures suivantes .

( vous pouvez agrandir cette figure ainsi que toutes les suivantes par un clic gauche suivi par un retour à la page précédente afin de poursuivre leur lecture )







*Alzheimer : La maladie est " due "(!) à des lésions cérébrales décrites la première fois par Aloïs Alzheimer (né en 1864 dans le sud de l'Allemagne ) en 1907 . La cause première de ces lésions cérébrales dégénératives neurofibrillaires dont le développement échappe encore à ce jour aux spécialistes , est totalement inconnue . L'évolution est insidieuse et progressive : inéluctable ( ce contre quoi il est impossible de lutter dans le présent ou le futur, qu'on ne peut combattre pour l'empêcher de progresser ; ce qu'on ne peut pas détourner, éluder c'est à dire se soustraire par un artifice ; éviter car la cause est inconnue) . Cette amnésie, perte de mémoire sévère, est la conséquence de ces phénomènes .

** déchéance de la mémoire, [intellectuelle] , de l'esprit : fait de déchoir, tomber dans un état inférieur à celui où l'on était...décrépitude . Situation inférieure à celle dans laquelle on était avant . Disparition progressive des structures normales des cellules d'un tissu, d'un organe ; évolution défavorable vers le pire .

*** décadence : implique une progression , aux conséquences inexorables, inévitables ,vers la ruine ; décadence de la mémoire et de l'entendement . Seule subsiste la présence des " Émotions " qui sont en grande partie épargnées pour le moment , en particulier l'affection, la tendresse, l'attachement, la gentillesse .

**** déclin : désigne l'état de ce qui commence à régresser . Le déclin précède la disparition ou la décadence .

***** dégénérescence : perdre ses qualités initiales ; altération anatomique des cellules vivantes . Perte des qualités, état de ce qui se dégrade avec le temps; changement qu'éprouve un corps organisé lorsque sous l'empire d'autres circonstances, il perd son caractère générique et se détériore .



La " Mémoire " : vaste et complexe sujet de réflexion !

C'est la mémoire qui constitue la plus grande et la plus importante partie de notre personnalité :





NOTRE PERSONNALITÉ ! Notre Personnalité (notre individualité ) notre Être, notre Moi, notre Ego, (notre tempérament) , enfin nous-même !





Celle de ma Doudoue, ma femme,après 50 années d'interactions communes fabuleuses, s'est transformée . Seule, pour l'instant, l'affection subsiste, se maintien, résiste à l'épreuve du temps et aux perturbations extérieures [ quoique, le matin, au réveil, "ma maman" se substitue à "mon doudou" ; certains jours, de moins en moins rares, elle me demande : qui tu es toi !] Plus aucune discussion d'antan,comme autrefois au temps passé; elle est "Ailleurs", c'est un autre " Être " toujours chaleureux, mais méconnaissable,un véritable "bébé !" . J'argumente sur tous les sujets,en toute circonstance, avec elle, inlassablement, sans me lasser, m'impatienter de son mutisme . Elle me regarde gravement, paraissant étonnée, ayant l'air de comprendre ! Je continue, patiemment, infatigablement ... mes discours dans le vide ?, peut-être pas encore dans le néant !

Personne , s'il n'a pas vécu avec deux êtres aussi dissemblables , celle avec laquelle on a vécu toute une vie , " sa Doudoue ", passé près de cinquante années merveilleuses à se construire ensemble, et celle que je chérie toujours de plus en plus, qui depuis quelques années n'est plus là ; dont la mémoire, ce bien parmi les plus précieux, qui constitue tout un être et qui lorsqu'elle disparaît progressivement, puis s'éteint totalement, fait que personne ne peut savoir ce qu'est vraiment ce fléau qui peut s'abattre sournoisement , insidieusement, inexorablement et pour toujours, sans répit ni espoir de ...

C'est pour cette raison que je vous présente et vous recommande,dans un premier temps, de prendre connaissance de ce numéro de La Recherche sur la Mémoire après cette longue interruption de mon blog , en vue de connaître comment fonctionne la mémoire de notre cerveau lorsqu'elle n'est pas perturbée par des phénomènes dont nous ne connaissons pas toujours les causes réelles profondes .




Gerboise n'a pas " oublié " ses fidèles lecteurs .





Depuis plus de quatre mois, un bruit infernal provenant de travaux importants, dans l'immeuble où nous résidons, a perturbé ma femme [atteinte de cette maladie inhumaine], incapable de comprendre ces sons incohérents que sont les bruits sourds provenant de ces rénovations . J'ai passé une grande partie de mon temps à la rassurer,minute par minute,des journées entières, sa mémoire ne dépassant pas quelques dizaines de seconde . C'est la raison pour laquelle je n'ai pu continuer à construire les billets de ce blog Gerboise . Ces perturbations dans l'immeuble sont terminées . Je vais pouvoir reprendre progressivement ces communications avec vous tous qui deviez vous interroger sur mon silence .


Voici , ci-dessous , la suite de la première image présentée dans ce billet .

Voici ci-dessous quelques pages de ce numéro spécial de La Recherche , numéro que je recommande de lire en vue de comprendre les problèmes qui se posent dans la connaissance des " structures " de la mémoire .










Voici les quelques pages concernant la maladie d'Alzheimer dans ce numéro spécial .





Je pense revenir sur ce thème dans d'autres billets, en vue d' approfondir les divers éléments de ce sujet fondamental , qui concerne les nombreuses apparences (ce qui paraît au dehors et peut ne point correspondre à la réalité) et configurations (formes extérieures) de la Mémoire humaine .


Bien à vous tous, cordialement, Gerboise .

mercredi 20 avril 2011

Ces femmes, qui exprimaient leur conditions de vie aux temps jadis,dans des chansons pathétiques,seul moyen parfois de clamer leur désespoir .


Il y aurait beaucoup à dire sur la condition féminine à travers les siècles ; et, de fait, beaucoup de choses furent dites, écrites,gravées, sculptées ou chantées, murmurées sur le sujet. Les principales intéressées, les femmes elles-mêmes , ne s'en privaient d'ailleurs pas ; y compris à une époque [ surtout avant le 19e siècle] où leur droit à la parole était réduit à sa plus simple expression, puisque leur vie se passait dans un perpétuel état de dépendance à tous les points de vue .



Vis-à-vis de leurs parents, de toute la famille, de l'ensemble de la société tout d'abord, puis de leur mari, « pour le meilleur et pour le pire » ( pour les plus heureuses et pour les plus pénibles circonstances de la vie ; la formule s'emploie habituellement en parlant du mariage et exprime la vision chrétienne de l'union idéalement durable, indissoluble au milieu de toutes les vicissitudes) , selon la formule consacrée ; le meilleur ne durant jamais bien longtemps, si l'on en croit, simplement, ce que racontent les chansons de toutes ces époques passées.


Car les femmes chantaient ; et c'était même là , à peu près, leur unique espace de liberté.


Elles chantaient en berçant leurs enfants, en filant, en tissant, en accomplissant leurs tâches ménagères au logis, au lavoir entre elles ; c'est-à-dire le plus souvent entre femmes, tandis que les hommes étaient occupés, hors de la maison, à la taverne, à leurs besognes d'hommes. Entre femmes, oui, il y avait des sujets dont on pouvait parler avec une relative liberté- ou plutôt chanter, car la parole directe engage parfois trop ; alors qu' il est si facile d'exprimer (vouloir dire; exprimer concerne en effet la pensée mais aussi les sentiments, que l'on manifeste par l'écrit et l'oral ainsi que par les gestes, l'attitude ) , exactement la même chose, en se réfugiant ( s'abritant, se mettre à couvert, se préserver) derrière les paroles d'une chanson. D'autant que les sujets ne manquaient pas : amours contrariés avec menaces de réclusion au couvent , pour les plus jeunes ; mariages arrangés par les parents, débouchant le plus souvent sur des unions désastreuses, pour les aînées ; maris tyranniques ou débauchés , que certaines n'hésitent d'ailleurs pas à tourner en ridicule ; fardeau du travail domestique et de maternités à répétition ( mortalité considérable durant la grossesse, ou lors de l'accouchement ! Là, elles étaient vraiment " délivrées " !) ; drames des filles-mères promises, à la prostitution, etc. Bref, un tableau des plus sombres.


Tableau, ce qui s'offrait à la vue, d'autant plus désespérant que la plupart de ces chansons devaient rester clandestines (sous le manteau ! en parlant d'interdits ; manteau a le sens métaphorique de « ce qui cache »), sous peine de sévères représailles, puisque les hommes avaient tous les pouvoirs. Y compris- pensaient-ils, ces naïfs ! - celui de vous empêcher de penser, de rêver, de les juger en silence, ou d'aimer ailleurs en secret… Pourtant - et il y a là un bien grand paradoxe, dû au poids considérable du sentiment social et du regard des autres - la hantise de rester vieille fille était plus forte que toutes les appréhensions (les inquiétudes ) que l'on pouvait nourrir (échafauder, construire dans son esprit) à l'encontre du mariage. Une angoisse correspondant à un double sentiment d'échec personnel et de culpabilité [mais n'est-ce point le propre des victimes que de se sentir éternellement coupables ?], que l'on retrouve dans de nombreuses chansons traditionnelles. Ainsi, à tout prendre, valait-il mieux un mari exécrable , détestable , répugnant,que pas de mari du tout !


Après l'apparition des mouvements féministes, vers le milieu du XIXe siècle, et les combats acharnés de quelques militantes emblématiques (caractéristiques) , tel que Flora Tristan, Pauline Roland (que Victor Hugo exalta quand elle mourut en 1852 au retour de déportation ) ou Louise-Michel, la situation commencera à évoluer ; et, remplissant comme toujours son office de miroir ( reflet) de la société, la chanson se fera, tout naturellement, l'écho de ces timides progrès.


Après ces réflexions sur la condition humaine féminine, construites à partir de ces témoignages subtils que furent ces airs chantés, fredonnés, par celles qui furent l'âme de notre douce France, répandus dans les campagnes, à travers les villages , les lavoirs et les champs, mais également par ceux sortis des ateliers dans les agglomérations et ceux exprimés sur les trottoirs, aux coins des rues des grandes villes , par de sympathiques " bateleurs " , malheureusement, de nos jours, presque disparus , nous continuerons à nous interroger sur cette société humaine si complexe, mais si riche en potentialités .


Fidèlement vôtre, Gerboise .

vendredi 18 mars 2011

Islamisme ? ... Tout bon musulman s'efforce d'imiter Mahomet en observant les leçons de la sunna,recueuil qui rapporte les faits et gestes du Prophète


. La Kaaba , sanctuaire cubique dans lequel est scellée la Pierre noire, et dont les pèlerins doivent faire sept fois le tour (Bibliothèque nationale, Paris) .

ISLAM : mot arabe signifiant :

- Résignation à la volonté divine ;

- Religion des musulmans [prêchée par Mahomet et fondée sur le Coran qui signifie, en arabe, « Récitation », et représente pour tous les musulmans le texte sacré par excellence : il est en effet la parole de Dieu devenu Livre. Les compagnons du prophète apprenaient par coeur les révélations au fur et à mesure que ce dernier les leur transmettait ; il les transcrivaient également sur des pierres plates, des omoplates de chameau et des morceaux de cuir . En 652, le calife Uthman, troisième successeur du Prophète, donna l'ordre de réunir tous les textes . Cette version, considérée comme définitive, est toujours en vigueur dans le monde musulman . Le Coran est composé de 114 sourates [chapitres] ,elles-même divisées en 6243 versets, ou ayats ] .

- Ensemble des peuples qui professent cette religion ou des pays musulmans [ le Monde arabe] et la Civilisation qui les caractérise.



Dictionnaire Géopolitique de l' Islamisme *
Les différents courants, les personnalités, les racines culturelles,religieuses et politiques , Bayard Editions, 2009 .
* Spécialistes dirigés par Antoine Sfeir, né en 1948 à Beyrouth, Liban , journaliste et enseignant franco-libanais de confession chrétienne, spécialiste du Moyen-Orient et plus généralement du monde arabe ; il dirige les Cahiers de l'Orient et préside le Centre d'études et de réflexions sur le Proche-Orient et est professeur en relations internationales au CELSA [École des hautes études en sciences de l'information et de la communication ] . Il s'installe en France en 1976 ; jusqu'à 1989, il est journaliste à Lacroix et au Pèlerin ; il collabore également au journal Le Point, au Quotidien de Paris, à L'Evénement du jeudi, ainsi qu'aux revues Études, Esprit, Afrique et Asie Moderne et Politique Internationale. Il est consultant de diverses émissions radio ou télévisées au sujet de l'islam et du Moyen-Orient .

Khattar Abou Diab, politologue, est spécialiste de l'islam est du Moyen-Orient .


Bernard Godard, chargé de mission au sein du bureau central des cultes du ministère de l'intérieur , est l'un des meilleurs spécialistes de l'islam de France .


Jean-Michel Salgon, politologue, est spécialiste du Maghreb . Il a coordonné le travail des rédacteurs .



Avec la collaboration de Matthieu Édouard Saab, analyste veille stratégique du Proche-Orient ; Mohamed Troudi, professeur de sciences politiques ; Christophe Jaffrelot, directeur de recherche au CNRS, ancien directeur du CERI et spécialiste de l'Inde ; et Pauline Garaude, spécialiste du Pakistan .



La naissance de l'islam


Au VIIe siècle de notre ère, une poussière de tribus, qui vivait du commerce et d'une maigre agriculture de subsistance, se taillent un empire qui va s'étendre de l'Afghanistan à l'Espagne . Cette expansion de l'islam est bien un phénomène unique dans l'histoire .


En 632, quand meurt Mahomet, sept ans avant le roi Dagobert, l'influence de la nouvelle religion se limite à l'Arabie, une Terre revêche, isolée, presque entièrement vouée au désert . Trente années plus tard à peine, les grandes chevauchées des rudes Bédouins déferlent sur la Syrie, l'Égypte, la Mésopotamie… Ils suivent alors à la lettre le verset du Coran qui dit : « Combattez ceux qui ne croient pas en Dieu et aux Dernier Jour . Tuez-les partout où vous les atteindrez ! Expulsez-les d'où ils vous ont expulsés ! Telle est la récompense des infidèles . » Mahomet n'a-t-il pas promis aussi que tout combattant mort à la bataille est assuré d'entrer au paradis ? L'empire Perse est détruit , l'Empire byzantin est menacé . Et les hommes du désert se sont transformés avec aisance en militaires de génie, en cavaliers émérites, en hardis navigateurs et en habiles administrateurs . Comment expliquer autrement le fait que l'islam a pu alors si facilement "digérer " toutes ses conquêtes ?


Donc, au début du VIIe siècle de notre ère, le prophète arabe Mahomet fonde l'Islam, religion qui va connaître une diffusion mondiale et qui compte de nos jours 800 millions d'adeptes environ .



Voici l'introduction de cet ouvrage précieux, inestimable, irremplaçable, qui vous permettra de vous rendre compte de l'importance de ce dictionnaire :
L'Encyclopédie de l'islamisme intitulée : " Dictionnaire Géopolitique de l'Islamisme ", Editions Bayard, 2009 .


C'est le premier dictionnaire complet sur l'islamisme, qui en éclaire les fondements, l'ensemble des courants et des acteurs, dans chaque pays du monde . Antoine Sfeir a réuni les meilleurs spécialistes internationaux pour établir cette somme inédite, qui permet une vision globale de ce phénomène .


L' « islamisme » est un concept purement français pour désigner les intégristes musulmans, ce que les Anglo-Saxons appellent les « fondamentalistes » . Il s'agit là d'un « isme » , retenu par l'orientalisme français, pour désigner un vaste courant intellectuel et politico- religieux de l'islam contemporain tenant, à la fois, de l'intégrisme catholique et du fondamentalisme protestant . Il partage en effet, avec l'un et l'autre, la peur d'une modernité réputée menaçante pour l'intégrité de la foi .


Le phénomène islamiste n'est pas nouveau

L'Islamisme est aussi vieux que la religion de Mouhammad elle-même, mais sa version moderne est née au tournant de ce siècle, en réaction contre le mouvement de la Renaissance arabe [ Al Nahda ] prônant un aggionamento ( adaptation de la réalité contemporaine, au progrès ; évolution [de l'église catholique en fonction des modifications du monde ] ) de l'islam . Il représente, à cet égard, une sorte de Contre-Réforme au courant réformiste initié par le penseur persan Jamaledinne el Afghani [mort en 1898] . Ce dernier préconisait une relecture critique du Coran à la lumière de l'histoire, de la linguistique et de l'archéologie . Son disciple, l'Égyptien Mouhammad Abdou [mort en 1905] , poussa encore plus loin le raisonnement, en appelant à une sécularisation de la société musulmane . Contre une telle tendance, la réaction vint d'abord d'un élève d' Abdou, le Syrien Rachid Rida [ mort en 1935] , qui se présentera comme le chantre de la « restauration » d'un âge d'or musulman mythifié . En 1928, est fondée à Ismaïlia [Égypte], l'association des Frères musulmans . Véritable matrice de l'islamisme actuel, la confrérie, dont la devise est « le Coran est notre constitution » milite pour islamiser l'État dans son intégralité, en imposant la Chari' a, la loi fondée sur le Coran, et la sunna, la tradition du Prophète, comme sources exclusives de toute législation et en rejetant tout apport culturel étranger à l'Islam .
Cela suppose, d'emblée, un statut inférieur pour la femme comme pour le citoyen non musulman . Considérant que la tradition est valable de toute éternité et en tous lieux, l'islamisme dénonce comme sacrilège l'approche moderniste du Coran .


Qui est donc islamiste ?

Tous ceux qui cherchent à islamiser l'environnement social, familial ou professionnel dans lequel ils se trouvent répondent à cette définition . Certains passent du prosélytisme à l'action violente : ce sont les terroristes poursuivis et traqués, aujourd'hui , par tous les services occidentaux . D'autres présentent un visage humain, souriant, n'hésitant pas à se " superposer " aux sociétés d'accueil, c'est-à-dire à reconnaître, par exemple, les lois et les règles de ces pays tout en insistant pour que soient prises en compte les spécificités et les identités islamiques .
À la différence des terroristes, ils rassurent les policiers et les magistrats, il en font d'ailleurs souvent leurs interlocuteurs privilégiés .
En revanche,
ils devraient inquiéter les sociologues, et les politologues car ils érigent lentement, mais sûrement, une société en marge des communautés nationales qui rejette, de facto, l'intégration dans les pays d'accueil .

La menace est double à l'égard des pays occidentaux : sécuritaire à cause du terrorisme et sociologique avec le risque d'une déstructuration des états .

Les événements du 11 septembre 2001, aux États-Unis, ceux de Riyad en 2003 et 2004, de Casablanca en 2003, de Madrid le 11 mars 2004, de Londres en juillet 2005 trouvent-ils ou non une quelconque justification dans le Coran ?

Quel a été le rôle des États-Unis et des services de renseignements américains dans l'expansion de l' islamisme .

Comment appréhender l'islam dans nos sociétés laïques ?

Depuis une dizaine d'années le monde a découvert un islam qu'il ne soupçonnait pas . Du coup des amalgames ( mélanges de personnes ou de choses qui ne sont pas faites pour aller ensemble) se sont multipliés : tout Arabe est musulman, oubliant qu'il existe près de 15 millions d'Arabes qui ne le sont pas ;
tout musulman est islamiste, alors que les islamistes constituent une minorité au sein du monde musulman ;
enfin tout islamiste est un terroriste alors que, là aussi, seuls quelques individus nostalgiques de la conquête islamique sont passés à l' acte .
Représentent-il pour autant tous les musulmans ?

L'Encyclopédie de l'islamisme tente de répondre à toutes ces questions . Elle présente des organisations, les hommes, les fondements historiques, les interconnexions et les alliances des islamistes entre eux, dans le monde et dans chaque pays . Si les auteurs abordent quelques notions de base de l'islam comme la Chari' a ou le Jihad communément qualifié de « guerre sainte », ils axent l'essentiel de leurs propos sur l'islamisme lui-même .

Nous avons l'ultime conviction que l'islamisme est aujourd'hui un phénomène qui concerne l'ensemble des pays occidentaux . C'est pour cette raison que l'Encyclopédie de l'islamisme couvre non seulement tous les champs de la géopolitique, mais aussi ceux de l'économie mondiale, en mettant plus précisément en exergue, par exemple, les enjeux pétroliers de la guerre d'Afghanistan .

Ainsi la méthodologie s'est-elle imposée naturellement aux auteurs :
-aborder les principes fondamentaux de l'islam en ce qu'ils permettent de mieux comprendre l'islamisme ;
-plonger dans les fondements historiques de l'islam ;
- revenir sur les écoles juridiques et les théologiens pour souligner la rupture que constitue l'islamisme ;
-passer en revue les mouvements qui brandissent l'étendard de l'islam et
-faire ressortir ceux qui, sur le terrain, affichent des ambitions universalistes .

Les organisations sont en effet multiples, nombreuses et diverses dans chaque pays .

Certaines ont même réussi, on le verra, à transcender les frontières . Inspirées de courants de pensée identifiés et bien définis, elles sont ancrées dans l'histoire .

L'Encyclopédie de l'islamisme revient longuement sur ces fondements pour expliquer simplement cette volonté de retour aux origines - le Salaf - souhaité par les islamistes . Les hommes aussi sont nombreux . Nous connaissons à travers les médias, les grands dirigeants : Ben Laden, le mollah Omar Hassan Al Tourabi… Mais il existe une véritable armée de lieutenants, de soldats, de personnel d'encadrement dont on ignore tout ou presque .
L'équipe des auteurs s'est attachée à les sortir de l'anonymat : pas seulement ce qui, d'ores et déjà, ont été identifiés et souvent arrêtés, mais aussi ceux qui poursuivent le travail de sape ( intrigue souterraine, travailler à détruire une chose en l'attaquant dans ses principes) commencé il y a une trentaine d'années .

Y a-t-il donc une internationale islamiste ?

Les auteurs de l'encyclopédie de l'islamisme répondent à la question . Ils font ressortir ce qui apparaît nouveau depuis quelques années : les contacts qui se multiplient entre les différents mouvements et organisations, entre les hommes et les courants de pensée . Ces passerelles transversales constituent un véritable cauchemar pour les services de renseignements occidentaux .

Comment peut-on lutter contre ce fléau des sociétés modernes sans pour autant ajouter à la victimisation des musulmans dans le monde ?

Comment éviter l'amalgame entre islam et islamisme ?

Comment enfin rendre simples des concepts et des idées qui nous apparaissent complexes et incompréhensibles ?

Près de huit ans après le déclenchement par le président américain George Bush de la guerre contre le terrorisme, le 7 octobre 2001, la nature et l'objectif de cette guerre ont changé : nous étions partis en Afghanistan pour traquer al- Qaida ; nous nous retrouvons aujourd'hui à faire la guerre contre les talibans !

L'encyclopédie de l'islamisme décortique tous ces sujets : les concepts, les courants, les acteurs - grands et petits - les organisations, mais aussi les réseaux économiques et financiers, les institutions publiques et privées .
Une équipe des meilleurs spécialistes, réunis autour des cahiers de l'Orient et de leurs auteurs, a élaboré chaque « entrée » de ce dictionnaire en tentant d'expliquer, à travers l'actualité, mais aussi la géopolitique, l'histoire et la sociologie, la portée de ces courants islamistes et leur influence, tant sur l'évolution des pays musulmans que sur les sociétés occidentales où se trouvent les communautés arabo- islamiques de plus en plus importantes .

L'encyclopédie de l'islamisme
n'est pas seulement un outil de travail, elle apporte un éclairage nouveau et lève le voile sur l'origine et les causes des événements récents afin de les comprendre et de mieux les appréhender .
Initiée par les cahiers de l'Orient et les éditions Bayard, cette expérience ambitieuse et sans précédent en France et dans les pays occidentaux . Avec l'ultime conviction que dans les pays musulmans et notamment ceux proches de nous, de l'autre côté de la Méditerranée, se joue une partie, et non des moindres, de notre devenir """ .



Le Dictionnaire géopolitique de l'islamisme aborde des sujets et des thèmes d'une actualité brûlante . Il ne s'agit aucunement d'une encyclopédie de l'islam, mais bien de l'islamisme, une dérive de cette religion, comme il en existe dans toutes les religions .



Le lecteur se gardera de tout amalgame de l'islam et de la majorité des musulmans avec les dérives islamistes, les fondamentalistes, les intégristes, les terroristes, etc.


ISLAMISME Signification

L'usage des termes tels que le fondamentalisme, intégrisme, islamisme suscite des controverses : ils sont parfois chargés de connotations négatives et ne peuvent donc, à ce titre, satisfaire à la rigueur exigée par le praticien des sciences sociales . Dans le cas des mouvements fondamentalistes dans la sphère (étendue d'influence) musulmane, la confusion atteint son apogée . Le mot islamisme, par exemple, qui signifie pour Le Robert (dictionnaire) : « religion musulmane » devient dans le lexique politique synonyme de fondamentalisme, d'intégrisme, voire de terrorisme . Cependant, les alternatives telles que le militantisme religieux, traditionalisme ou orthodoxie sont tout aussi insatisfaisantes . Tous les mouvements fondamentalistes ne sont pas militants, beaucoup sont loin de l'orthodoxie et certains méritent d'être distingués des mouvements traditionalistes du fait de leur radicalisme ou de leur manipulation de la technologie moderne .

Globalement, l'islamisme - ou plutôt, le fondamentalisme musulman - est une idéologie politico- religieuse qui vise à instaurer un État islamique régi par la chari'a et à réunifier l'oumma [nation musulmane] .
Cependant, cette définition relativement simple recouvre une situation complexe, des réalités qui varient selon les pays où les courants idéologiques [ Frères musulmans sunnites et islamistes radicaux chiites…] .



De plus, les courants islamistes oscillent entre une fidélité littérale à la tradition et l'aspiration au renouveau par le biais des réformes ou des situations révolutionnaires . Avec l'actuelle montée en puissance des mouvements religieux, des guérillas régénérées et des sectes, on peut constater un changement majeur : ce qui, jadis, semblait spécifique à l'islam s'impose désormais comme composante d'un phénomène plus général de contestation religieuse, identitaire ou sociale face à la mondialisation en ce début du IIIe millénaire .



CHARI'A [ Loi islamique]


Ensemble des normes et injonctions issues du Coran et de la sunna [ la Tradition] , et qui forment les piliers du droit musulman .


La Chari' a, que l'on peut traduire par « normativité révélée de l'islam » exprime pour les musulmans la volonté divine sur les hommes . Le mot signifie littéralement « la voie qui mène à Dieu » puisque le but de vie de chaque musulman et de revenir vers Allah . De ce point de vue, la chari'a est l'expression de la volonté divine dans sa généralité et sa sacralité immuable . Selon le Coran, Dieu a révélé une loi à chaque grand prophète : Noé , Abraham , Moïse , Jésus et Mouhammad [ Mahomet] .

La loi islamique représente la dernière des législations transcendantes, en ce sens que le prophète Mouhammad est le dernier des messagers sur terre . ""


Voici les éléments d'information que Gerboise tenait à vous faire connaître en vue de clarifier dans votre esprit les messages des diverses sources d'information , parfois contradictoires, qui peuvent parvenir jusqu'à vous .

Fidèlement votre, Gerboise .

mardi 15 février 2011

Lueurs* de l'aube à approfondir : Réflexion de Jean Fourastié sur l'Être humain dans son livre, Faillite de l'Université, 1972, éditions Gallimard **

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* Lueurs : illuminations soudaines de l'Esprit, passagères, qui donnent l'idée d'une " sorte d'apparence " qui peut conduire à la révélation d'une chose inconnue jusqu'alors ; expressions vives ,imprévues et subites pour la Réflexion . Avoir des lueurs, quelques lueurs sur quelque chose : lumière, apporter ses lueurs, ses connaissances, sur un sujet, c'est ce dont il est question dans cette rubrique .

** Jean Fourastié, 1907-1990 : après des études d'ingénieur et d'économiste et une douzaine d'années au ministère des finances, Jean Fourastié a été appelé en 1945 au Commissariat général au plan que venait de fonder M. Jean Monnet . Il y présida les commissions de la main-d'oeuvre de quatre plans successifs . Depuis 1967, il borne de son activité à l'enseignement et à la recherche . Il a été professeur au Conservatoire National des Arts et Métiers et à l'Institut d'études politiques de Paris et éditorialiste au Figaro .

" Il est vain de persuader un homme d'une réalité, même expérimentalement démontrée, qu'il ressent comme contraire à sa conception du monde ." [ Idées majeures . Pour un humanisme de la société scientifique, Paris, éditions Gonthier, 1966] .

" La difficulté que nous avons à enrichir notre connaissance d'un sujet déjà connu en partie, est plus grande que la difficulté à acquérir d'emblée la connaissance d'un sujet antérieur ignoré " [ Comment fonctionne notre cerveau, Paris , éditions Robert Laffont, 1974] ( d'où la nécessité de ne pas déflorer superficiellement, ce dont nous ne sommes pas capables, pour une raison ou pour une autre, d'expliquer minutieusement tous les aspects dans des contextes les plus variés possibles).



""Une espèce animale qui pense, qui se pense et qui pense le monde, et qui ne comprend plus, qui ne sait plus trouver de réponse qui la satisfasse aux questions qu'elle se pose sur les causes, les buts et le sens de la vie, et qui pourtant est maîtresse de ses instincts et devient responsable d'elle-même, de son avenir et de la planète où elle née... : telle est l'espèce humaine .

Un être qui doit prendre sans cesse des décisions individuelles et collectives de plus en plus conscientes, de plus en plus réfléchies, de plus en plus efficaces, et qui sait de moins en moins quels buts ultimes, quelles fins dernières ( ce qui est cherché pour lui-même, et non comme un moyen d'atteindre une fin ultérieure, ce qu'il y a au terme de la vie) leur assigner… tel est l'homme d'aujourd'hui .

Bien entendu je ne suis pas en mesure de répondre à ces questions, je ne suis pas en mesure de proposer à l'homme une nouvelle conception du monde . Il est évidemment bien loin de ma pensée que les valeurs traditionnelles effondrées puissent être réhabilitées .

Elles ne sont pas compatibles avec l'esprit scientifique expérimental .

Or le problème est justement qu'il faut à l'homme un système cohérent d'explication du monde et de la vie .

Ce système doit être en accord avec ce que la science expérimentale, notre seule source d'informations sûres, nous a appris et nous apprendra . C'est en ce sens que j'ai écrit dans un autre livre qu'il nous faut une " religion " ( observation scrupuleuse d'un principe : se faire une religion d'une chose )… acceptable pour les « Prix Nobel » [ Lettre ouverte à 4 milliards d'hommes, Albin-Michel, Paris, 1970] .
Mais cette " religion " acceptable pour les « Prix Nobel », elle doit être à l'usage de l'homme moyen . C'est à tous qu'elle doit porter le courage et le réconfort . C'est à chacun qu'elle doit permettre de dominer ses instincts et ses passions, sans les dérégler ni les tuer .

Il ne peut donc être question de restaurer en bloc les valeurs traditionnelles ; mais il faut se préoccuper du vide que laisse leur effondrement ; il faut si possible les remplacer, les pallier (résoudre de façon provisoire une difficulté pratique) , les renouveler . Il faudra sans doute bien des années pour cela ; peut-être des siècles . Mais il n'est que plus certain que la crise née de leur absence sera grave pour l'espèce et douloureuse pour les individus .

Mon seul objectif ici ne peut être que d'envisager comment l'Université peut se comporter dans cette crise, comment elle put tenter d'en réduire la durée et la gravité . Comment elle peut aider ses étudiants à[la] vivre…

... La mentalité traditionnelle, que nous savons aujourd'hui infantile et erronée, a cependant permis à l'humanité de persister et même de progresser quoique fort lentement pendant des centaines de milliers d'années . L'intelligence épurait certes mal, mais ne troublait pas les réflexes de l'instinct . L'effondrement de la mentalité traditionnelle, sans qu'aucune conception du monde et de la vie la remplace, laisse le cortex désemparé, doutant de lui-même . L'indécision, l'instabilité, l'inquiétude, l'angoisse maux classiques des intellectuels, se répandent chez l'homme moyen .

Comment une pensée claire désorientée pourrait-elle faire mieux que l'instinct ?

Je n'hésite pas à écrire que les sources mêmes de la vitalité peuvent être menacées . Les valeurs qui font progresser l'humanité ne sont pas les mêmes que celles qui la font durer . L'Université, qui a oublié les secondes pendant deux siècles, doit aujourd'hui leur porter toute son attention . ""

Gerboise vous laisse réfléchir sur ce texte, très riche en concepts essentiels, de Jean Fourastié . Je serais heureux si je pouvais lire des commentaires de vous tous, lecteurs, à la fin de ce billet .

A bientôt, bien à vous, Gerboise

mercredi 5 janvier 2011

Économie, non pour les nuls, mais pour les non-conformistes : Bernard Maris*, un auteur à connaître…? Ses deux antimanuels d'économie **





Ci-dessus :Sommaire du tome 1

* Bernard Maris (voir ci-dessous, à la fin de la présentation de l'éditeur au verso du tome 1 de l'ouvrage )


** Tome 1 : les Fourmis
**Tome 2 : les Cigales



Voici ci-dessus le sommaire du Tome I : Les Fourmis , du livre de Bernard Maris : ANTIMANUEL D'ÉCONOMIE, publié aux Éditions Bréal, 2003 . Nous pensons que cet ouvrage apportera aux lecteurs de notre blog un point de vue très original de cette science très particulière située à l'interface, à la frontière entre les sciences dites "dures " (physique, chimie, sciences de la Terre et de la Vie) et les sciences humaines .


En vue de vous inciter à vous procurer les deux tomes de ce livre dans lequel vous trouverez énoncés des problèmes vitaux, nous vous présentons les deux introductions de l'auteur qui vous permettront de comprendre les enjeux, les connaissances de cette discipline aussi ancienne que l'Humanité .

(Vous pourrez agrandir les images des deux sommaires en y effectuant un clic gauche)

Mais auparavant, il est important de situer l'ouvrage tel que le présente l'éditeur au verso du tome 1 :


Peut-on échapper à l'économie ?

Elle imprègne l'art, le sport,le sexe et la guerre ; elle engage le quotidien de la ménagère comme celui du manager .

La « marchandisation de la vie » devient l'hymne de l'époque ,et les économistes sont ces farauds (malins,fiers, prétentieux, qui cherchent à se faire valoir) apôtres, capitaines autoproclamés à la proue du «progrès» de l'humanité . Le rationnel est leur sextant ( instrument de mesure en toute chose) , le quantifiable est leur boussole (instrument d'orientation) .

Entre loi de la jungle et productivisme acharné, cartels et stock-options, la statistique quadrille leur parcours . Des kilos d'équations lestent leur « raison raisonnante » .

Tout juste admettent-ils qu'une main invisible leur vient parfois en aide, altruiste ou impérieuse selon les cas .

C'est oublier que l'homme n'est pas, mais alors pas du tout, rationnel . Et que l'économie est avant tout une réflexion sur le partage . Qui regarde le gâteau, qui tient le couteau ?

Une autre économie est-elle possible ?

L'espéranto économique est-il le jargon d'une science dure, le sabir d'une science molle, ou le cache-misère d'une science nulle ?

Traquant les fioritures et les pseudo- concepts, cet Antimanuel permet à chacun de s'armer pour comprendre la harangue des chefs de la guerre économique . Car dans le monde des comptes, il ne faut pas s'en laisser conter .

Sur un ton léger mais incisif, Bernard Maris convoque tour à tour des économistes , de Keynes à Stiglitz , mais aussi, plus inattendus, des philosophes ou des romanciers : Montesquieu, Swift, Jarry, Maupassant, Orwell ou Houellebecq …


Qui osera désormais dire que l'économie est ennuyeuse ?




* Bernard Maris [ doctorat en sciences économiques à l'Université de Toulouse ; il devient professeur des universités par concours d'agrégation en 1994 ; il a enseigné la micro-économie à l'Université d'Iowa (USA) et à la Banque Centrale du Pérou] a publié de nombreux ouvrages d'économie, ainsi que des romans[Prix Leclerc des libraires en 2003 pour L'Enfant qui voulait être muet ].Professeur d'université en France et aux États-Unis , il anime la page économie de Charlie- hebdo,sous le nom d' Oncle Bernard.Doté en 1995 du titre de "meilleur économiste ",connu par des ouvrages comme Lettre ouverte aux gourous de l'économie qui nous prennent pour des imbéciles , Ah Dieu ! Que la guerre économique est jolie ! ou encore La Bourse ou la vie, ne dédaignant ni l'anthropologie , ni la sociologie, ni la psychologie, l'économie qu'il révèle et que nous vivons nous permet de réfléchir à un au-delà de «l'horreur économique». Il écrit pour différents journaux : Marianne, Le Nouvel Observateur, Le Figaro Magazine, Le Monde et Charlie Hebdo . Il intervient dans des émissions de radios et de télévisions .


Introduction du tome 1 :

"" Faut-il lire des économistes ?

Faut-il en rire ?

Oh non ! Ils sont bien trop sérieux ! Tellement sérieux que « l'économie, moi je n'y comprends rien », avouent la plupart des gens .

« Je n'y comprends rien »… N'est-ce point la phrase que l'on entend sans cesse lorsque l'on est confronté à un problème économique ?

Suivie aussitôt de : « Au fait, la Bourse… Vous pensez que ça va continuer à baisser ? »

Eh bien, nous allons chercher à comprendre.

Que l'économie soit très compliquée paraît un gage de sérieux. Et si les économistes se cachaient derrière un jargon ?



Car de quoi parlent-ils au juste ?

Les physiciens débattent, entre autres, de la chute des corps et de l'expansion de l'univers, les chimistes des explosifs, les biologistes des mutations génétiques, des OGM qu'ils fabriquent, du clonage et du sida…

Mais les économistes ? Sont-ils tellement différents des sociologues, des psychologues, des philosophes ?

« Et comment donc ! » Crient-t-ils alors, arguant des nouveaux quartiers de noblesse de leur discipline, sanctifiée par un prix Nobel .En vérité, ce prix est offert par la banque de Suède en l'honneur d'Alfred Nobel et n'est pas un vrai prix, décerné par la Fondation Nobel . Mais cela n'y change rien ! Ils ont des Nobel [ mais il est vrai qu'il n'existe pas de prix Nobel de mathématiques, ce qui est dû à d'obscures raisons de jalousie ou d'adultère, Alfred Nobel détestant un certain mathématicien célèbre…]

Les économistes- des professeurs d'université ou du Collège de France, des experts, analystes, des journalistes économiques qui font des pages économiques et des suppléments - aimeraient beaucoup ressembler aux physiciens . Sont-ils pour autant de vrais savants ? En tout cas, il s'agit d'hommes très important, on le voit bien au moment des discussions du budget, des lois sur l'allongement du travail des actifs ou de la baisse des impôts pour certains, des élections, des grèves, des crises . Ils sont même de plus en plus influents, si l'on en juge par l'explosion des suppléments et des émissions économiques . Même un hebdomadaire comme Charlie hebdo possède sa page économique !


Théories économiques et café du commerce .

Alors, de quoi parlent les économistes ? «Oikos Nomos » : de la gestion de la maison . De la « ménagère », d'où vient le « manager » des Anglo-Saxons . Pour mémoire, Sully ( 1560-1641, conseiller très écouté du roi Henri IV, il fut chargé de superviser les finances royales ) était le « bon mesnager » du doux royaume de France …


Mon ami Alain (?) , directeur d'une grande revue très appréciée des professeurs d'économie, grand amateur d'économie, dit toujours que rien ne l'amuse autant que les « théories » économiques, qui consistent à dire, avec quelques kilos d'équations et un jargon incompréhensible pour 99 % des économistes professionnels eux-mêmes d'ailleurs, ce qu'on raconte entre deux bourrades au café du commerce : « demain ça ira mieux, à condition que ça n'aille pas plus mal, si la confiance revient, et si les gens ont envie de consommer et de travailler, pas vrai mon gars, remets-moi un canon . » L'une des grandes excroissances de la casuistique économique de ces dernières années est la « théorie des incitations» .Elle a dû remplir quelques bibliothèques d'articles impénétrables et laborieux autant que sublimes, qu'on pourrait résumer ainsi : pour produire mieux,il faut de la confiance et de la transparence .

Chapeau !Au Moyen Âge et jusqu'aux Lumières, la casuistique a fait vivre pendant des générations des milliers de clercs dévoués à une « science » qui a fini par disparaître,tout comme il se peut que l'économie disparaisse un jour .D'ailleurs,n'a-t-elle pas déjà disparu ? Le meilleur économiste n'est-il pas le chef d'un État quand il désarme un conflit social et rétablit la « confiance » de ses concitoyens dans l'avenir ?

Le général De Gaulle menait sa politique sans prêter beaucoup d'attention aux coassements de Cassandre des économistes et disait :

« Rétablissons la confiance et l'intendance suivra ! »

Jacques Attali,grand économiste s'il en est,définit un économiste comme

«celui qui est toujours capable d'expliquer magistralement le lendemain pourquoi il s'est trompé la veille»


Keynes disait à peu près la même chose et recommandait à ses pairs une place modeste,subalterne, comparable à celle des dentistes, capables de soigner avec des instruments, des médicaments et des méthodes qu'ils n'ont pas inventés .Il affirmait que demain «simplement,on ne sait pas» .

L'économiste se heurte et se heurtera à jamais au mur d'airain de l'incertain .


D'ailleurs,s'il savait,s'il anticipait le futur économique mieux que d'autres, il serait milliardaire .


Mais regardons-le s'agiter,entre deux heures supplémentaires à l'université, dans les journaux ou à la radio,lorsqu'on lui demande « oui,d'accord,mais demain ? Ça s'arrange ? » On comprend alors qu'il ne peut pas grand-chose pour nous .


D'autres économistes [ Kondratieff, Schumpeter,Marxou encore l'historien Braudel] croyaient en de grandes «pulsations» économiques,de grandes phases d'expansion et de récession .Mais il s'agit aussi plus de croyances que de vraies lois car il n'y a pas de lois économiques.


Prégnance de l'économie .


Pourtant,peut-on échapper à l'économie ?

Existe-t-il un seul domaine social qui ne soit imprégné d'économie ? Le sport ,Le sexe ? La guerre ?

«Combien coûterait une guerre avec l'Irak ?»Titrait en une Le Monde du 4 janvier 2003 .Quand on parle de sport ou de sexe,surgissent illico les aspects économiques du problème : salaires, ventes, marchandisation de la vie .Tout aspect de la vie des hommes en société a toujours un aspect monétaire et quantitatif ; mais désormais cet aspect est essentiel et tend à expliquer ou impliquer tous les autres. Il existe toujours une «raison économique» des choses. Le pétrole pour l'Irak,l'argent pour l'édition,le marché de la pub pour la télé…

Les deux grands systèmes de pensée dont à accouché le capitalisme,à savoir le socialisme et le libéralisme,

colorent tout des couleurs de la raison et de la quantité .L'un et l'autre s'abreuvent à la source utilitariste [Jeremy Bentham, 1748-1832 , fut le père de l'école " utilitariste " à l'origine de la théorie économique dite néo- classique, la seule enseignée aujourd'hui . En bref : un individu est rationnel et il acquiert, dans la limite de ses revenus, les biens qui lui apportent le plus d'utilité possible afin de satisfaire des besoins .D'où sortent les besoins,le revenu ? Mystère .On remarque que c'est un principe de rareté qui fonde l'économie : revenu limité, besoins théoriquement infinis] . La«rationalisation» du monde et sa «quantification»portées par les lumières,puis l'expansion de la science,de la recherche et de l'expérimentation,voguent de concert avec sa marchandisation .

Notre économiste,quantificateur et rationnel, se tient,faraud, à la proue du «progrès»de l'humanité.

Il explique,rationalise et calcule, et d'ailleurs explique en termes de calcul rationnel .

Est-il plus ou moins rentable d'être un criminel qu'un honnête homme,nous demande le prix Nobel 1991 GaryBecker .Plus ou moins rentable,pour un ménage,avoir un enfant de bonne qualité que deux de mauvaise.

Est-il plus ou moins rentable pour un homme politique,d'être corrompu qu'honnête,questionne le prix Nobel 1986 James Buchanan .

L'ouverture des frontières de tel pays était-elle plus ou moins rentable pour ce pays, étant donné ses pesanteurs politiques et culturelles, analyse magnifiquement a posteriori le prix Nobel 1993 Douglass North .

Comment expliquer rationnellement,en termes le coûts - avantages , l'autarcie de la Chine et l'expansion de l'Europe ?

Nul doute qu'on puisse toujours rationnellement et économiquement expliquer le retard de l'Afrique, l'avance des États-Unis ou la stabilité de la demande de camembert, «étant donné le contexte» ou «toutes choses égales par ailleurs» .

Mais la raison résonnante des économistes est en train d'en prendre un sacré coup.

Il y a deux signes qui ne trompent pas .

- Le premier est l'aveu du prix Nobel 2001 Joseph Stieglitz concernant son passage à la banque mondiale,et la politique économie orthodoxe d' icelle et du FMI [ lire La grande Désillusion,Fayard,Paris,2002 . Pour la première fois,un économiste sort de sa tour d'ivoire et avoue qu'il peut être à l'origine…d'émeutes . Il raconte que les experts sont d'une ignorance crasse, manipulés par les politiques, ou le plus souvent, par des idéologues primaires ] .

- Le second concerne l'attribution du prix Nobel d'économie 2002 à un psychologue, Daniel Kahneman, qui raconte ce que mon copain Alain et son idole Keynes savaient depuis toujours : à savoir que les hommes ne sont pas,mais alors pas du tout, « économiquement rationnels» .


Que faut-il enseigner ?

Ces pensées nous conduisent aux programmes de sciences économiques et sociales .On me reproche souvent :

«Mais,vous,totalement critique,qui n'arrêtez pas de fustiger l'économie et les économistes, que pouvez-vous bien enseigner ?»

Je réponds « d'abord, l'histoire économique» . Et avec quel plaisir ! Les faits économiques . On peut raconter l'affaire Enron (mise en faillite le 2-12-2001 - la plus grosse faillite de l'histoire américaine est une sorte de travail pratique de l'économie, exemplaire du fonctionnement du capitalisme) de deux façons :

1) comme une affreuse histoire de malhonnêteté, de transparence non respectée, de dissimulation,d'asymétrie d'information,et renvoyer à la face des ignorants une volée d'équations de la théorie de l'information . On peut geindre sur l' « éthique des affaires », sans se rendre compte qu'on pleurniche sur un oxymore ( figure qui consiste allier deux mots de sens contradictoires pour leur donner plus de force expressive : ex. , une douce violence) .

2) on peut aussi raconter l'histoire d' Enron - et elle devient passionnante - comme celle de la politique énergétique des États-Unis et les relations du Parti républicain avec certains milieux d'affaires ; également comme l'histoire des pratiques des banques d'affaires, des analystes , des agences de notation, et même des journalistes ! Il y a de quoi faire !

Ensuite,un économiste doit raconter l'histoire sociale .Évoquer l'économie indépendamment de la sociologie,de la psychologie ,de l'anthropologie est un leurre pour laisser croire que l'économie est la matrice,la science supérieure, le moule explicatif dans lequel doit se dissoudre la complexité sociale . Heureusement les programmes du secondaire font [encore] beaucoup de place aux disciplines analysant la société .

-Le secondaire enseigne les «sciences économiques et sociales» : on démarre avec Max Weber, on n'oublie pas Marx et on consacre beaucoup de temps à ce que l'on appelle le lien social,avec ses conflits,ses inégalités . On réfléchit sur le travail,la richesse .

-Dans l'enseignement supérieur,tous ces mots disparaissent et sont remplacés par des signes,des graphiques, des équations .

Il ne s'agit plus de dire ce qui est,mais ce qui doit être : l'économie de marché .

À l'esprit de finesse,lié à la pluridisciplinarité du champ secondaire, succède l'esprit de géométrie,qui ne prétend plus comprendre le monde, mais le métrer, le formater selon le calcul économique et l'idéologie du calcul .

Pourquoi ?

Pour fabriquer de bons petits soldats de la « guerre économique», cette guerre de tous contre tous qui vous occupera de longues années avant une maigre retraite .Certes,de jeunes professeurs dénoncent [enfin !] cet « autisme» de l'enseignement universitaire .

Mais «la tendance est lourde», comme dirait l'autre[économètre] ! En 2003, un changement de programme,le douzième en 10 ans,prévoit de privilégier,en supprimant certains auteurs du programme,comme Pierre Bourdieu, " une approche normative des objets d'études au détriment des questionnements ".

L'économie dit ce qui doit être,et non ce qui est .

Ouvrant l'oeil .Dans le monde des comptes,il ne faut pas s'en laisser compter ; et inversement .


Mais de quoi parle de l'économie ?


Ah, vous êtes têtu ! Les belles analyses ne vous suffisent pas ! Les équations ! Les modèles ! Vous voudriez savoir ce qu'il y a derrière…

De quoi parle de l'économie ?

Du partage .Du partage de la richesse . Qui regarde le gâteau, qui tient le couteau ?

C'était le but octroyé à l'économie politique par le grand Ricardo, dans son ouvrage Des principes de l'économie politique et de l'impôt [Garnier-Flammarion, Paris, 1993, première édition 1817 . David Ricardo, 1772-1823, est considéré comme le père de l'économie "déductive" ou " analytique "] , et depuis on n'a pas dit mieux .


L'économie, c'est fondamentalement la question de la répartition .

Pourquoi? Parce que la question du partage est liée à celle de la rareté, il n'y a pas de problème économique ( ... ) .

(...) Certes, " comment fabrique-t-on le gâteau ? " est aussi une belle question que peuvent accaparer les économistes .

Quels sont les ingrédients du gâteau ?

Des voitures, de la pollution, des médicaments, des logiciels, des livres ? De la terre ? Des paysages ? Nous nous y intéresserons à la fin de cet Antimanuel . Avec quelles énergies fabrique-t-on ce gâteau ?

Du travail, du capital, de l'argent, des techniques, du savoir ...

Les économistes ont occulté la question du partage .

Ils parlent de marché, de besoins, de services, d'offre et de demande, sans se demander d'où viennent ces biens, ces services, ces besoins, ces marchés, ni pour qui ils ont été créés . Ils ont aussi occulté la question du pouvoir .Ils parlent de contrats quand ils évoquent le marché, et qui dit contrat dit réciprocité .Malheureusement,le monde est incertain .Très incertain .C'est pourquoi ceux qui ont quelques clés de l'avenir [ les initiés,les fabricants d'information,les diffuseurs de statistiques,les connaisseurs de la situation exacte des finances de l'entreprise] ont un pouvoir sur les autres . Ont un pouvoir sur les autres également ceux qui peuvent leur racheter leur temps à travers leur contrat de travail (...) .

(...) Nous allons découvrir comment les économistes ont «naturalisé »l'économie,l'ont soumise à de pseudo- lois naturelles ou immanentes, pour éviter les sujets clés :

Qui fabrique l'argent permettant aux gens de vivre ?

Qui crée l'opacité sur le marché ?

Pourquoi occulter le rôle néfaste et l'inefficacité des marchés ?

Pourquoi occulter le rôle majeur joué par l'altruisme et la gratuité dans le processus économie ?

Qui a intérêt à ce que le problème économique [le problème de la rareté] ne soit jamais résolu, dépassé, remisé à arrière- plan , comme le souhaitait Keynes ?
( John Maynard, économiste et financier britannique, 1883-1946) .


Commentaires de l'éditeur situé au verso du second tome .

Le premier tome de cet Antimanuel racontait la rareté, l'offre, la demande , la concurrence , le commerce , l'argent … C'était le tome des fourmis : raisonneuses,rationnelles , égoïstes ,épargnantes , bref ,calculatrices. Le lecteur découvrait, un peu étonné,que la compétition n'était pas le vrai moteur des échanges et qu'elle laissait souvent la place aux phénomènes de pouvoir,de mimétisme et de foule.

Voici venu la revanche des cigales!


Et si l'inutile, la gratuité, le don,l'insouciance,le plaisir,la recherche désintéressée,la poésie,la création hasardeuse engendraient de la valeur? Et si les marchands dépendaient - Ô combien ! des poètes ? Et si la fourmi n'était rien sans la cigale?

Voici venu le temps d'affirmer,contre les économistes , que l'inutile crée de l'utilité , que la gratuité crée de la richesse , que l'intérêt ne peut exister sans le désintéressement.

On verra que ce livre ne dédaigne en rien les marchands . Mais pourquoi sont-ils devenus la classe dominante ? Pourquoi sommes-nous sortis de ces sociétés ,de chasseurs-cueilleurs ,qui« marchaient dans la beauté» , comme le chantent certaines tribus.Nous sommes passés du côté de l'utile et du laid .Et en même temps, le capitalisme fait partie de notre vie,tout simplement,et ne mérite pas d'être méprisé , sauf à mépriser la vie .
Si l'on veut approcher l'essence du capitalisme , il faut sortir des sentiers de l'économie et musarder avec l'histoire , l'anthropologie et la psychologie.



Ce second tome se situe aux frontières ou au-delà de l'économie .""


Tome II : Les cigales

Ci-dessus : Sommaire du tome 2


Présentation de l'ouvrage par l'auteur lui-même :

"" Disons que tout naît de la rareté .

Il n'y a de problème économique que par ce qu' il y a de la rareté .
La rareté implique le calcul, organisation, le partage, bref, l'économie .

À partir de la rareté, les économistes ont cru résoudre une question fondamentale posée à l'humanité :

Celle de la valeur des choses .

Valeur monétaire s'entend . Les économistes la mesurent par les prix, après un détour par l'offre et la demande .

Le premier tome de cette Antimanuel prétendait raconter la rareté et le partage
[ qui fait le gâteau ? qui tient le couteau ?], l'offre, la demande, la concurrence, le commerce, argent, la raison, l'égoïsme .

C'était le tome des fourmis : raisonneuses, rationnelles, logiques, égoïstes, épargnantes, bref, calculatrices .

Aux termes du tome I , le lecteur avait à peu près compris comment fonctionne une économie . Et il découvrait, un peu étonné, que la concurrence, la compétition, n'étaient pas vraiment le moteur des échanges et que le calcul laissait souvent la place à la politique, aux phénomènes de pouvoir, de mimétisme et de foule .

L'éloge de la gratuité, qui achevait le livre, laissait entendre que la valeur, cette fameuse valeur que les économistes associent à l'offre et à la demande et que d'autres[Marx, Keynes] relient au travail, pouvait naître du désintéressement, du plaisir, de l'inutile… En vérité, les économistes, classiques ou non, ne voient que la face émergée de l'iceberg de l'économie, et le tome I de cet Antimanuel ne considérait que cette face trop visible .

Or, voici venu la revanche des cigales !

Et si l' inutile, la gratuité, le don, l'insouciance, le plaisir, la recherche désintéressée, la poésie, la création hasardeuse engendraient de la valeur ?

Et si les marchands dépendaient - ô combien ! - des poètes ?
Et si la fourmi n'était rien sans la cigale ?

Voici maintenant venu le temps d'affirmer, contre les économistes, que l'inutile crée de l'utilité, que la gratuité crée de la richesse [de la vraie : sonnante et trébuchante] , que l'intérêt ne peut exister sans le désintéressement .

La raison de ce second tome tient en cette phrase :

La gratuité engendre de la richesse [ encore une fois, non pas une richesse abstraite, mais bel et bien une richesse monétaire] .

Voilà, me semble-t-il, un champ que n'ont jamais osé labourer les économistes, trop mesquins, coincés dans le carcan de leurs calculs .

Je dois avouer que ce second tome se propose aussi de lever une insatisfaction tout à fait personnelle . Au lecteur d'en juger, au moins aurai-je ouvert quelques pistes .

En effet, j'ai toujours été fasciné par cette question : « Pourquoi le capitalisme ? » ou, pour le dire autrement, : « Pourquoi un monde dominé par les marchands ? » Pourquoi l'humanité s'est-elle condamnée à barboter et à claquer des dents dans « les eaux glacées du calcul égoïste »[Marx] ?

La réponse à ces questions n'a rien d'évident. On verra que ce livre ne dédaigne en rien les marchands, les intermédiaires, les gens qui sont dans « l'intérêt » [étymologiquement, entre les êtres]
Mais pourquoi les marchands sont-ils devenus la classe dominante ?
Pourquoi sommes-nous sortis de ces sociétés de chasseurs-cueilleurs, qui « marchaient dans la beauté » , comme le chantent certaines tribus ?
Nous sommes passés à côté de l'utile et du laid . « Tout ce qui est utile est laid »[ Théophile Gautier] . Et en même temps, le capitalisme est notre grande aventure, notre vie tout simplement, et ne mérite pas d'être méprisé, sauf à mépriser la vie .

Les économistes peuvent difficilement répondre à la question

« Pourquoi le capitalisme ? »

Ils peuvent partiellement évoquer - et c'est beaucoup, c'est toute l'économie moderne - comment une valeur marchande peut naître à partir du gratuit . Mais si l'on veut approcher l'ontologie du capitalisme, il faut sortir des sentiers de l'économie et musarder avec l'histoire, l'anthropologie et la psychologie .

L'histoire nous dit pourquoi l'Europe, l'anthropologie nous dit pourquoi le contrat et l'argent, et la psychologie nous souffle, en sourdine, pourquoi tout finira mal . Ayant choisi l'aventure capitaliste, avons-nous choisi de nous autodétruire ?

De grands économistes, passionnés de psychologie[ Keynes, Schumpeter] , l'ont pensé .


Ce second tome se situe aux frontières ou au-delà de l'économie .

Nous y rencontrerons des économistes et des penseurs peu ordinaires : Nicolas Georgescu-Roegen et les penseurs de la technoscience ( Jacques Ellul, Bernard Charbonneau, Ivan Illitch] , Serge Latouche et la décroissance, Jean-Pierre Dupuy] et le mimétisme Girardien - René Girard sera un des fils conducteurs de ce livre - et des valeurs sûres, comme Keynes et Schumpeter .

Le lecteur ( certains sûrement) sera déçu de ne pas croiser plus souvent Karl Marx, alors que les historiens[Fernand Braudel, David S. Landes…] , les sociologues [ Max Weber, Raymond Boudon…] Et les anthropologues[Marcel Mauss] sont abondamment cités .

J'ai sans doute eu tort . Peut-être l'ai-je trop lu, et il reste certainement l'un des plus grands . Cependant des concepts essentiels de l'économie moderne comme ceux de synergie ou de réseau, largement utilisés dans ce second tome, sont absents de son oeuvre . De même, à tort, je ne parle pas assez de Friedrich Hayeck, le plus antilibéral des libéraux .

Au risque de faire hurler les plus grands économistes de ma génération et de la précédente, je ne pense pas que Léon Walras et son concept d'équilibre général aient apporté grand-chose à l'économie . Walras, hélas, a momifié l'économie, l'a congelée . Il a posé un problème mathématique, résolu par Broüwer, que Nash a énoncé en d'autres termes forts intéressants et forts destructeurs pour la pensée libérale . Mais un problème mathématique est un problème mathématique, c'est tout[et c'est déjà beaucoup] .

D'ailleurs, la loi de Say[ l'offre qui crée sa propre demande] pose la question de l'équilibre en des termes autrement plus profonds que l'équilibre simultané walrassien . Quant à l'économie libérale, ou néoclassique, je pense franchement, avec le recul, qu'elle n'a pas grand intérêt, au-delà de ce que le calcul économique peut apporter à des gestionnaires d'entreprise .
La micro-économie, l'individualisme méthodologique me paraissent des aberrations ou les excroissances de la pensée, du même tonneau que la casuistique .

Aux termes de cet Antimanuel, j'ose encore exprimer ma fascination pour Keynes . Et pourtant, il eut peu de certitudes… Mais peut-être, tout simplement, l'économie a-t-elle peu à dire sur la vie des hommes en société .

Il me reste maintenant à reconnaître des dettes, énormes, et sans doute mal employées ! …

Cordialement vôtre, Gerboise .